LUCY, PEAKS

"JUDAS AND THE WATCHTOWER" AMEL OMAR & SID DANKERS
"A HÂ-HÂ" LAURA DE JAEGER, CYRIAQUE VILLEMAUX, NIENKE FRANSEN
"MAYBE ON EARTH" SIBERT MISPELON & JULIEN JONAS
2023-2024

English text







En ce printemps humide plusieurs invitations de Lucy, peaks. 

En mai, je me rends dans une élégante maison, près de l’avenue Brugmann. Dans le jardin vert boisé, un grand chat gris, gonflé et aérosolé me fixe avec ses yeux jaunes. Une petite mare nous sépare. Son compagnon marron dort en boule dans les hautes herbes. Un peu plus loin, une table de jardin en fer forgé blanc rouillé se voit doté d’un verre grossissant. Est-ce elle qui a procédé à l'inventaire de la faune et de la flore que je trouve au dos du plan? Tout au fond du jardin, au pied d'un mur en brique élevé, me voilà avec mes talons enfoncés dans la boue. Je colle mon œil contre le petit trou d'une boite en plexiglas crémeux. J'entrevois le dessin d’une dame qui soulève sa robe, découvre ses jambes gonflées (rétention d’eau ?) et montre un pénis hermaphrodite. Je souris en m'attendant à ce genre de gaminerie de la part du représentant mâle de ce trio d'artistes. Et puis je me sens un peu binaire après cette piste hermaphrodite. Tout près, dans les fourrées, un petit bonhomme en bois peint me regarde d'ailleurs avec colère. L’ai-je dérangé et que fait-il derrière l’arbre? De prime abord, c’est-à-dire du côté face, on aurait dit une sculpture graphique avec deux cercles colorés, en hommage à John Baldessari, mais de l’autre côté c’est plutôt un dickhead avec une paire de boules rose bonbon intitulé "Hello, mister art professor". Comptes à régler? au ras des buissons? 

Au mois de juin à nouveau une invitation de Lucy, peaks.


Cette fois-ci, dans un immeuble de construction récente, boulevard Léopold II à Molenbeek. Devant une grille, un attroupement de personnes jeunes vêtus de couleurs sombres. Après un temps d’attente, mon tour arrive et je prends place dans un ascenseur avec un guide à la casquette rouge Honda. Descente vers le sous-sol, ouverture des portes, odeur aqueuse et nauséabonde. Décidément l’eau s’accumule partout. Un tableau cage (ascenseur?), des murs en briques de ciment et des portes, beaucoup de portes. Certaines sont entrouvertes à dessin d’autres par erreur et je finis dans le local poubelle où j’examine chaque container pour voir s’il a fait l’objet d’une intervention artistique. Ce n’est pas le cas. Retour dans le couloir où au plafond une enceinte diffuse un bruit indéfini qui tranche avec le cliquetis précis des compteurs. Je longe des consoles étroites aux pieds en métal. Leur surface, à mi-hauteur, et recouverte d’une fine couche de poussière déplacée par des doigts touche-à-tout créant un effet pictural. Au sol, des cubes en plexiglas avec dans l'un, une maquette de cuisine avec un évier où l'on aimerait faire couler de l'eau. Un rappel que pour chaque unité d'habitation correspond une cave et sans doute un emplacement de parking. on passe d'un étage à l'autre. Beaucoup de carrés et de rectangles.

Lucy, peaks. Quelque chose avec les (sous)sols, les (fonds) de jardin et de couloirs. Jeu de piste, escape room et des trous pour orienter notre regard. Souvenirs de ce studio au boulevard Clovis avec une installation télescopique suspendue et un judas pour regarder dans...un couloir. Verre agrandissant, yeux jaunes, cercles colorés, petit trou noir, grands ballons en plastique irisés, serrures de portes. 

 J’attends la prochaine invitation. 







Roshan Di Puppo